mercredi 8 décembre 2010

Peut on encore pratiquer le développement personnel en formation continue ? par Jean Louis Verdier

A PROPOS DU CONTRÔLE DES ORGANISMES DE FORMATION PRATIQUANT LE DEVELOPPEMENT PERSONNEL


INTERVENTION DE M.BERNARD DREANO, chef du Service de Contrôle de la DGEFP (Direction générale de l'Emploi et de la Formation professionnelle - Ministère du Travail) auprès de la Fédération de la Formation professionnelle (FFP) le 28 octobre 2010


Cette intervention fait suite à la Circulaire "Instruction DGEFP N° 2010/21 du 3 août 2010 relative aux axes prioritaires de contrôle à partir du second semestre 2010".


Résumé de la circulaire

Cette circulaire indique que (extraits) :
• « les formations comportant, pour une part importante, voire en totalité, une dimension "comportementale sont en constante augmentation ».
• « Or, une bonne partie des prestations proposées par ces organismes relèvent en fait, sous couvert de « développement personnel », d’avantage du bien-être, voire du loisir que de la formation professionnelle continue. De ce fait, les dépenses afférentes à ces actions ne peuvent être imputées au titre de la participation des employeurs, ni faire l’objet d’un financement par les OPCA ».
• « Dans certains cas, ces prestations peuvent présenter des caractéristiques problématiques en termes de santé publique, voire d’exercice illégal d’activités médicales ou paramédicales, et parfois de dérives sectaires ».

Le contrôle des inspecteurs de la Formation professionnelle doit d’exercer à 3 niveaux :
• lors de la déclaration d’activité d’un organisme annonçant ce type de prestations
• à l’occasion d’enquêtes sur des organismes déclarés à partir des spécialités de formation affichées (…)
• par des contrôles sur place d’organismes dont les prestations peuvent poser problème.

Le contrôle doit examiner particulèrement :
• la nature des publics visés (et notamment les pré-requis des stagiaires …)
• le lien possible avec un ou des postes de travail ou les conditions de travail et les évolutions professionnelles
• le mode de financement des prestations (contrat individuel de formation notamment).

Il est demandé aux préfets et aux directeurs du travail de l’emploi et de la formation professionnelle de mettre en place un contrôle dès le second semestre 2010.

M. Bernard DREANO, chef du Service de contrôle de la DGEFP est donc venu expliquer cette circulaire devant les membres de la FFP, le 28 octobre 2010.


Les termes et dispositions à préciser

Il s’agit d’abord de vérifier le respect des règles d’application de la Formation continue ; cela signifie qu’il ne s’agit en aucun cas d’une évaluation des Organismes de Formation (OF).
Il s’agit ensuite de vérifier la réalité des actions et la validité des financements.
Le principe de base est que l’argent de la Formation doit bien servir à la Formation des salariés et non pas à des formations d’ordre privé (« mieux-être » ou formations « pour aller mieux ») ou dissimuler des activités de loisirs.

Les questions de base sont donc les suivantes :
• Y a-t-il ou non acquisition de compétences ?
• Y a-t-il adéquation entre la fin et les moyens ?
• Y a-t-il des pré-requis ?
- En un mot, que s’agit-il d’enseigner et à quel public ?

M. Dreano a précisé qu’il y aurait environ 300 organismes à contrôler.
En premier lieu qui diffusent des « activités discutables, voire problématiques, à la limite de la thérapie » avec :
• un public pas ciblé
• avec risque d’exercice illégal de la médecine
Sont ici visées toutes les formations délivrées au public sans pré-requis concernant, entre autres les « thérapies douces ou alternatives ».

A noter tout de suite qu’une formation qui viserait à former des praticiens de telle pratique de thérapie s’inscrirait dans la formation professionnelle, à partir du moment où ils veulent en faire un métier. Une telle formation ne serait donc pas visée par la circulaire.

Par contre, une identification des stagiaires de type « toute personne qui… » est une indication vague. Les questions qui se posent au contrôleur :
• - y a-t-il un objectif à la formation ? (un objectif professionnel)
• - le public est-il identifié ?
• - y a-t-il des moyens quji permettent d’aller d’une qualification à une autre ?
C’est ce qu’il appelle la « triangulation » des actions de formation.

L’évaluation : si elle n’est pas prévue dans le process, elle n’est pas obligatoire. Attestation et évaluation sont destinées à prouver « par tous les moyens ». Il peut y avoir 2 évaluations : l’une pour le stagiaire, l’autre pour l’entreprise, si elle l’exige.


La notion de « coaching »
-« Çà dépend ».
Des discussions sont engagées avec la Fédération Française de Coaching (FFC). Encore une fois, s’il s’agit de former de futurs coachs, c’est de la FP ; s’il s’agit de réaliser un coaching pour une personne privée, ce n’est pas franchement admis (il est resté vague sur la question).
Pas de problème en ce qui concerne le coaching d’équipe car le public, les objectifs et l’évaluation des acquis peuvent être clairement énoncés.

La FFC a fait valoir qu’une prestation de conseil approfondi et personnalisé peut devenir une prestation de formation. Dreano déclare que ce n’est pas le cas : les budgets de la formation doivent être réservés à la formation.
Ainsi, dans une prestation de coaching, il n’y a pas de formation. Mais une formation de futurs coachs est une formation.

Les labels vont garantir une garantie de moyens.
Une attestation de stage n’est pas une évaluation des acquis.

Les dérives sectaires
Il s’agit de traquer les questions de dépendance et d’abus de faiblesse, c’est à dire de mise en danger d’autrui. Il s’agit en outre de problèmes en relation avec la protection de l’enfance. « C’est un poblème ultra-marginal dans le cadre de la formation : les organismes sectaires sont repérés et il ne s’agit pas des OF (même pratiquant des formations aux techniques douces). Il l’estime à 0,03% des OF. Il n’y a qu’en France qu’on fait le lien entre sectes et formation.
La dérive sectaire relève souvent d’une démarche de charlatanisme. Il donne l’exemple de cet organisme proposant 3 séminaires sur l’acquisition de la philosophie taoiste et la doctrine de CG Jung, en 3 week ends. Il constate que :
• -l’objectif de l’enseignement n’est pas en adéquation avec la philosophie taoiste (vérification faite dans les écrits du Maître « lama thibétain » invoqué comme gourou — et comme argument de vente — ce dernier indique qu’il faut 2 ans de travail assidu pour atteindre ces objectifs)
• idem pour une formation au Reiki en 3 week ends : ce qwui est professionnalisant demande 3 ans de travail.
• - la proposition s’apparente donc au délit d’escroquerie.
Il y a escroquerie s’il n’y a pas les moyens de la formation.
Or ces formations « charlatanesques « ont souvent recours au DIF pour leur financement.

Les formations de confort
L’exemple est celui des formations de massage : elles ne s’adressent pas au kinésithérapeutes, elles ne visent pas à former des professionnels : ce sont des formations de bien-être ou de confort.. La Fédération des Masseurs kinésithérapeutes a d’ailleurs porté ploainte pour exercice illégal d’une profession para-médicale.

A l’inverse, le développement des formations de massage capillaire chez les coiffeurs :
• - elle est demandée par le public et constitue donc un savoir-faire professionnel
• - elle appartient au poste de travail
• - ce n’est pas un exercice illégal d’une profession médicale ou para-médicale
Donc, pour lui, c’est OK.

Sur le contrôle des OF en développement personnel : ils ont écarté 75% des OF ; Ils recherchent des frontières (cad des caractérisations plus précises et des distinctions dans les types d’action).